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Blog médical et geek de médecine générale :
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mardi 24 septembre 2024

Dragi Webdo n°454 : TDAH (reco HAS), asthme de l'enfant (recos), pneumopathies infectieuses, HSV-2, traitements de migraine, allergie pénicilline, sédentarité

 Bonjour, voici les actualités de la semaine, bonne lecture !

1/ Pharmacovigilance

L'ANSM informe des ruptures de stock de vitamine B12 injectables, alors pour les réserver aux patients ayant besoin d'un traitement parentéral, il est recommandé de ne pas prescrire les ampoules per os mais d'utiliser les formes en comprimés si la voie orale est choisie. 


2/ Allergologie

Pour venir appuyer les recos du DW précédent sur les allergies à la pénicilline, une revue systématique a inclus 9 200 patients avec antécédent d'allergie à la pénicilline. Le taux de patients ayant une réaction allergique après une réintroduction directe (sans test cutané préalable) était de 3,5%. Or ce taux est similaire à la survenue de réactions chez les patients ayant un test cutané préalable normal. 

 

3/ Cardiovasculaire

Deux études de cohortes ont suivi des patientes pendant respectivement 13,5 et 6,7 ans. Les auteurs montrent que les patients restant sédentaires (assis plus de 5 heures par jour comprenant notamment la télé, l'ordinateur et la conduite) avaient des risques de mortalité globale (NNT environ 40-45 patients à 13 ans, la courbe étant c'est linéaire: 600 patients par an environ), de mortalité par cancer, d'évènements cardiovasculaires et de maladie pulmonaires supérieurs aux patients assis moins de 5h/jour. De plus, remplacer un temps sédentaire par 30min d'activité physique quotidienne (incluant la marche pour le plaisir), améliorait quand même la mortalité globale, par cancer, par maladies cardiovasculaires et pulmonaires (-3,5% de risque relatif pour la mortalité globale, pas de chiffres absolus disponibles).


4/ Pneumologie

La société savante de pneumologie et allergologie pédiatrique a publié des recommandations sur l'asthme entre 6 et 12 ans à travers une succession d'articles en accès limité, une fois encore. 

Le diagnostic repose sur des signes cliniques typiques (sifflements, toux, dyspnée, oppression), variant en intensité, de majorant la nuit, déclenchés par l'exercice, le froid, les viroses ou les allergènes. La spirométrie est recommandée mais pas systématique à cet âge d'autant plus que souvent normale entre les crises. Le diagnostic peut être posé via une spirométrie avec un  VEMS/CV < - 1,645 z-score et la réversibilité concise à  +10%. En l'absence de spirométrie, le DEP, mesuré 2 fois par jour pendant 7 jours et mettant en évidence une variabilité > 15% confirme l'asthme. Le bilan comprend une radiographie thoracique et une recherche d'allergènes respiratoires.

L'évaluation de sévérité initiale n'est pas modifiée par rapport aux recos antérieures: s'il y a 1 crise par mois maximum, sans symptôme nocturne ni retentissement, c'est un asthme intermittent qui ne requiert pas de traitement de fond (palier I). Le reste est persistant, plus ou moins intense selon la fréquence des crises et le recours aux urgences et nécessite un traitement de fond. Mais les patients sont soit asthmatiques connus, soit arrivent pour 1 première crise donc ça s'applique assez mal en vrai, donc on débutera généralement par le palier II lors d'une découverte d'asthme persistant. Pour le contrôle, les auteurs proposent l'ACT ou le score GINA qui est un peu moins intuitif, mais intègre la spirométrie anormale comme critère de "partiellement contrôlé".

On passe au traitement de fond. Rien de neuf, on ne fait pas de SMART (même traitement de crise et de fond) chez l'enfant. Donc l'augmentation des paliers est classique. A noter que le fluticasone x2/j pourrait mieux contrôler les symptômes que les autres et peut être utiliser une fois par jour lorsque les symptômes sont contrôlés (alors que le beclometasone doit être utilisé 2 fois par jour). Le montélukast n'a de place qu'en cas d'asthme induit par l'effort ou d'impossibilité d’adhésion aux CSI ou avec les CSI faible dose si palier supérieurs non supportés. On note que les généralistes et les pédiatres sont incapables de gérer les enfants avec un asthme nécessitant un palier 3 et qu'il faudrait adresser ces enfants à un pneumo-pédiatre et donc il faut probablement anticiper le RDV 6 mois à l'avance. En vrai, c'est niveau "avis d'expert", donc on fait comme on peut, avec EFR idéalement quand même (Par contre au delà du palier 3, il faut en effet un avis plus spécialisé).

Enfin, le traitement de la crise d'asthme est abordé. Il est recommandé d'évaluer la sévérité, notamment avec le score PRAM (<4 = léger, 4-7= modéré >7 = sévère) et en recherchant les signes de gravité: fatigue, difficulté à marcher ou à parler, FR < 16 ou >30, FC > 125, spo2 < 95%, MV diminué et détresse respiratoire. En l'absence de signe de gravité : faire 4 bouffées de salbutamol toutes les 20 minutes, et 10 bouffées si signes de gravité. Les corticoïdes oraux sont recommandés à 20mg pendant 3 jours si poids < 20kg et à 40mg si poids >40kg en cas de crise non sévère avec facteurs de risque d'asthme sévère (non contrôlé > 7 jours, terrain polyallergique, allergie alimentaire, logement humide, atcd de séjour en réanimation) ou en cas de crise sévère. Au décours, le salbutamol 4 bouffées x 4 par jour est à poursuivre jusqu'à résolution des symptômes. Le DEP est totalement absent sauf pour dire qu'il est utilisable si la valeur de base de l'enfant est connue et qu'un retour à domicile est possible s'il est >75%. Il n'y a pas d'examen complémentaire systématique recommandé pour les crises non graves.


5/ Infectiologie

En attendant les futures recos de la SPILF, le JAMA a publié une revue sur les pneumopathies. Le diagnostic repose sur la présence de 2 signes (fièvre > 38°C ou <36°C ou leuco > 10000/mm3 ou < 4000/mm3) ou symptômes (toux, dyspnée) associés à une radiographie compatible et sans autre étiologie. Devant les faibles sensibilité et spécificité des signes, une radio thoracique systématique est recommandée mais sa sensibilité n'est que de 70% et sa spécificité de 55%.... Donc si la radio est normale malgré la suspicion, ils conseillent un scanner. La CRP n'est pas mentionnée du tout. Au final, les auteurs estiment que 10% à 30% des pneumopathies sont du surdiagnostic. Des études montreraient que l'utilisation systématique de tests Covid et grippe devant toute pneumopathie réduirait l'utilisation d'antibiotiques, et favoriserait le traitement précoce par antiviraux (mais comme les antiviraux ne réduisent rien et qu'il existe des pneumopathies bactériennes post virales...). Sur le plan thérapeutique, l'évaluation repose sur l'utilisation du PSI ou score de Fine, mais cela sous estime les risques chez les moins de 50 ans. En ambulatoire, une monothérapie est recommandée notamment amoxicilline ou doxycycline et en cas de comorbidité amoxicilline+ac. clavulanique ou C3G orale + doxy ou macrolide (les quinolones seulement si allergie vraie contre indiquant les autres classes). En hospitalier, la bithérapie betalactamine + macrolide est recommandée malgré les études discordantes notamment en cas de pneumopathie non sévère. La durée d'antibiothérapie recommandée est de 3 jours en ville (3 à 5 jours à l’hôpital et 7 jours si BMR). Revenons sur ces 3 jours. Il y a des études hospitalières ("si ça marche à l’hôpital, ça marche en ville comme c'est moins grave, hein"), qui montrent que l'évolution peut permettre de limiter à 3 jours l'antibiothérapie si à J3, il n'y a plus de signes infectieux (apyrexie, FC < 100/min, spO2 >90%, FR < 24/min, PAS > 90mmHg). Ce qui implique une réévaluation systématique, ou sinon c'est peut être que c'est pas des pneumopathies bactériennes... quand on voit que dans le même temps le traitement de l'otite augmente à 10 jours avant 2 ans en France, ou que les infectiologues rechignent à dire "pas d'antibiotiques dans les angines non hyperalgiques à streptocoque " alors que c'est fait dans de nombreux pays.

 

Un article aborde les infections herpétiques génitales majoritairement à HSV-2. Épidémiologiquement, plus de 80% des patients avec anticorps anti HSV-2 n'ont jamais eu d'épisodes d'herpès génital. Les patients symptomatiques ont en moyenne 4 épisodes de récurrence par an. La confirmation diagnostique est effectuée par prélèvement local avec PCR (car 75% de faux négatif avec la culture). Tous les patients avec herpès génital peuvent avoir un traitement suppressif (notamment valaciclovir), qui réduit de 50% les poussées, de 80% l’excrétion virale, et améliore la qualité de vie. Les femmes enceintes avec antécédent d'herpès génital devraient avoir un traitement suppressif proposé à partir de 36SA. Les traitements épisodiques sont quant à eux des traitements allant jusqu'à 10 jours. Il ne faut pas oublier le fardeau de la maladie, le retentissement psychologique qui peut être associé et l'information concernant le risque de transmission pendant les rapports visiblement bien diminués avec l'utilisation systématique de préservatifs.


6/ Neurologie

Le BMJ a publié un article comparant l'efficacité des différents traitements de la migraine. Le traitement de référence était le sumatriptan et les critères de jugement étaient le soulagement de la douleur à 2 heures, puis la persistance de l'antalgique entre 2 et 24 heures après traitement. Globalement l'élétriptan et le rizatriptan sont plus efficaces que le sumatriptan. L'ibuprofène est légèrement plus efficace sur les douleurs à 2-24heures et les nausées/sensations de malaise. Le naproxène soulage aussi ces derniers symptômes, mais est moins efficace sur la douleur. Dans tous les cas, chacun des traitements étudiés est efficace, c'est vraiment l'efficacité relative par rapport au sumatriptan qui était étudiée ici. On regrette quand même l'absence d'étude concernant une bithérapie triptan+AINS par rapport à triptan seul.


7/ Pédiatrie

La HAS a sorti ses recommandations sur la prise en charge des patients souffrant de TDAH. Le diagnostic ne doit pas être posé avant 5 ans et uniquement par un professionnel formé aux TDAH (si <5 ans équipe spécialisée ++). L'examen doit évaluer les symptômes mais aussi le retentissement personnel, familial et scolaire ainsi que les comorbidités (tout est détaillé dans la reco). La PCO peut être une aide pour l'évaluation multidimensionnelle. Les outils qui peuvent être utilisés proposés : SNAP IV, Conners, ADHAD-RS et le KIDDIE-SADS pour l'entretien psychiatrique. La prise en charge comprend des interventions non médicamenteuses :  psychoéducation et proposition d'outils pour les parents (mais on peut regretter l'absence d'annuaire de professionnels formés à la psychothérapie dans un climat pédopsychiatrique assez désertique et des délais d'accès toujours plus longs) grade B, programmes d’entraînement aux habiletés parentales (avec là un recensement des ressources !) grade C, programmes d'ETP, accompagnement scolaire et pédagogique, du soutien psychologique par les TCCE (TCC et émotionnelles), hygiène de vie (sommeil, alimentation, activité physique). Côté médicamenteux,  le méthylphénidate LP reste en première ligne avec une fiche de suivi du traitement, y compris avant 6 ans dans les TDAH sévère (hors AMM et donc NR) avec possibilité de changer de forme LI, LP ou libération modifiée selon la sensibilité individuelle (variable selon les individus entre les molécules). La surveillance de la tolérance recherche des troubles du sommeil ou de l'appétit, des tremblements, des palpitations et des modifications du poids. En 2e intention, l'atomoxétine peut être utilisée moyennant des démarches d'AAC puisque hors AMM et décommercialisé et en 3e intention la clonidine (hors AMM). La reco a aussi des conseils aux enseignants pour les adaptations (probablement utile vu la vague d'enseignants sans expérience recrutés après les speed dating la veille de la rentrée). 

 

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@Dr_Agibus et @DrePetronille



mardi 17 septembre 2024

Dragi Webdo n°453 : allergies aux antibiotiques (recos US), semaglutide/ICFEP, nutriscore, BPCO, nirsevimab, ménopause, insuline hebdomadaire

Bonjour ! Sans plus attendre, voici les actualités de la semaine, bonne lecture !

 

 1/ Cardiologie

Commençons par une revue systématique du Lancet évaluant l’efficacité du semaglutide dans l’insuffisance cardiaque à fraction d'éjection non altérée (FE > 40%). Notons que bien qu'on soit dans l'IC à FE préservée, 80% des patients avaient un bêta bloquant et un IEC. L'analogue du GLP1 réduisait le critère composite cardiovasculaire de mortalité cardiovasculaire ou d'hospitalisation/consultation urgente pour insuffisance cardiaque (NNT= 48), porté par les aggravations d'insuffisance cardiaque (NNT=22) et sans différence sur la mortalité cardiovasculaire. Il y avait moins d'effets indésirables sévères dans le groupe semaglutide (ce qui est un peu étrange)! Enfin, l'analyse en sous groupe montre une interaction sur l'IMC impliquant que ces résultats ne sont applicables que chez les patients avec IMC >35. Bref, on a un effet connu de la perte de poids sur les poussées de l'insuffisance cardiaque, mais il n'est pas certain qu'il y ait un effet propre aux aglp1 sur l'insuffisance cardiaque.

Le Nutriscore a de nombreux détracteurs, car certains produits ne sont pas si "A" que ça (mais une mise à jour 2024 reclasse par exemple les sodas 0 de A à B) et car l'industrie agroalimentaire souhaiterait peut être qu'il disparaisse. Mais une nouvelle étude de l'INSERM montre que la consommation d'aliments moins bien notée est associée à davantage de maladies cardiovasculaires. Conservons cette information globalement pertinente!!

 

2/ Pneumologie

Une étude s'est intéressée aux effets du tabagisme "faible" sur le risque de BPCO. La BPCO était définie comme VEMS/CV < 0.7 et VEMS < 80% de la théorique. Les auteurs ont suivi pendant 5 ans des patients avec un tabagisme < 10PA parmi lesquels il y a eu 23% des patients qui a développé une BPCO. Puis sur une période de suivi pouvant aller jusqu'à 40 ans, les auteurs ont trouvé que les patients avec une BPCO et un tabagisme < 10PA avaient 3 fois plus de risque d'exacerbation que ceux qui n'ont pas de BPCO et moins de 10 PA et ceux sans BPCO avec un tabagisme >10 PA avaient déjà un risque d'exacerbation multiplié par 2 !


3/ Allergologie

Les américains avaient publié des recommandations sur les allergies aux antibiotiques en 2022 qui sont synthétisées dans un article du JAMA. L'ensemble des recommandations est d'un niveau de preuve modéré ou faible. Tout d'abord, les tests allergiques sont recommandés pour retirer les "allergies à la  pénicilline" des dossier médicaux des patients (reco forte). Chez les enfants, avec une suspicion d'allergie à la pénicilline ayant entraîné une allergie cutanée bénigne (érythème morbiliforme, urticaire),  la réintroduction ne nécessite pas de test cutanés (reco forte). Il en est de même pour les allergies > 5 ans chez l'adulte, concernant les pénicillines, macrolides, fluoroquinolones et sulfamides (reco faible). La réintroduction doit tout de même être faite sous surveillance. En cas d'allergie à la pénicilline, l'utilisation de C3G est recommandée sans réserve en cas d'allergie non-anaphylactique et proposée avec surveillance en cas d'allergie anaphylactique.

 

4/ Pédiatrie

Une étude de cohorte rétrospective a été menée dans des urgences pédiatriques espagnoles. Ils ont noté une stagnation du nombre d'infections respiratoires et d'infections à VRS durant les hivers 2018-2019, 2019-2020 et 2022-2023 (les années covid ont été exclues). A l'hiver 2023-2024, le gouvernement espagnol a mené une campagne d'immunisation contre le VRS par Nirsevimab chez les nourrissons nés pendant l'hiver et ceux de moins de 6 mois en période épidémiques. Les auteurs trouvent que le nombre d'infections respiratoires, le nombre de bronchiolites et le nombre de bronchiolites sévères en 2023-2024 ont diminué de 60% environ. Il n'y avait pas de région "contrôle" en dehors de la région de Navarre qui ne vaccinait que les nourrissons nés durant la période hivernale et pas "ceux de moins de 6 ans). Dans cette région la réduction des hospitalisations pour bronchiolites à VRS n'était réduite que de  30% environ.


5/ Gynécologie

Annals of internal medicine aborde les traitements des symptômes génitaux de la ménopause. Il est assez concordant avec la revue du JAMA. Avec un niveau de preuve faible, les oestrogènes vaginaux étaient efficaces pour réduire la sécheresse vaginale et les dyspareunies, tout comme la DHEA locale et les hydratants vaginaux. La testostérone et l’ocytocine vaginale, la DHEA orale et le raloxifène oral n'ont pas démontré de bénéfice.


6/ Diabétologie

Après l'insuline hebdomadaire icodec (cf ici), un essai du NEJM compare l'insuline hebdomadaire efsitora avec l'insuline degludec (ultralente quotidienne) chez les patients diabétiques de type 2. Sur le contrôle glycémique évalué par l'HbA1c, l'efsitora était non inférieure à la degludec (respectivement 6.97% vs 7.05% d'HbA1C à 52 semaines). Le temps dans la cible était significativement supérieur dans le groupe efsitora (64% vs 61%) et il n'y avait pas de différence significative de risque d'hypoglycémie. Plus en détails, il y avait une augmentation non significative +30% d'hypoglycémies clinique avec efsitora mais les 6 hypoglycémies sévères survenues dans l'étude étaient dans le groupe degludec.

 

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dimanche 8 septembre 2024

Dragi Webdo n°452 : HAS (PrEP, TPE, Mpox), insuffisance surrénale (NICE), coronaropathie (sujet âgé, AOD), finerenone et ICFEP, mammographie, acuponcture, surtraitement diabète

Bonsoir, on est dimanche soir (ça faisait longtemps...) et voici donc un nouveau Dragi Webdo ! Commençons par parler de l'évolution de la charge de travail pour les patients dans une étude du BJGP. On y voit qu'entre 2005 et 2019, le temps clinique nécessaire par patient a augmenté d'environ 50 % (intégrant les MG et les nurses). Concernant la charge des généralistes plus spécifiquement, le temps d'actes purement administratifs a été multiplié par 2,7 sur cette période, faisant passer ces actes de 16% du temps de travail à 30% !

Sur ces éléments dont nos dirigeants devraient être conscients, nous vous souhaitons une bonne lecture !


1/ Pharmacovigilance

Il y avait des doutes sur l'utilisation des aGLP1 et les risques de suicide. Cette étude concernant le semaglutide a trouvé que les patients obèses traités n'avaient pas de sur-risque de dépression par rapport aux groupes placebos dans l'analyse combinée de 4 essais randomisés. Le traitement réduisait même les symptômes dépressifs de façon statistiquement significative, mais cette réduction n'était pas cliniquement pertinente.


2/ Cardiovasculaire

Cet essai randomisé a comparé une stratégie conservative versus une revascularisation chez des patients de plus de  75 ans avec un SCA ST-. Les patients avaient 82 ans en moyenne et 30% étaient fragiles. La stratégie invasive n'a pas réduit le critère composite cardiovasculaire ni la mortalité cardiovasculaire. Encore une fois, faire trop ne sert pas.

Au cas où certains seraient encore partisans de la bithérapie "aspirine  + AOD" dans les coronaropathies stables des patients avec fibrillation auriculaire alors que l'AOD seul est suffisant, voici un essai randomisé comparant les 2 stratégies avec l'edoxaban comme AOD. Sur le critère de jugement principal (composite d'évènements thrombo-emboliques, de saignement et de mortalité), les patients du groupe bithérapie avaient un surrisque global par rapport au groupe AOD seul (NNH =11 patient par an!), résultat essentiellement porté par les hémorragies. Bref, restons-en aux AOD seuls.

La finerenone, est un un antagoniste non stéroidien des minéralo-corticoide déjà recommandé dans l'insuffisance rénale (cf ici). Elle a été essayée dans l'insuffisance cardiaque avec FEVG > 40% dans un essai randomisé incluant 6000 patients suivis pendant près de 3 ans (60% avec FE>50%). Le CJP (poussées d'insuffisance cardiaque et mortalité cardiovasculaire) a été réduit de 16% dans le groupe finerenone (NNT=38/an), porté par les poussées d'insuffisance cardiaque, sans différence de mortalité cardiovasculaire ou globale. Il n'y avait pas globalement davantage d'effets indésirables sous traitement, mais plus d'hyperkaliémies > 6mmol/L (NNH=63 patients sur 3 ans) et d'hypotensions < 100mmHg (NNH=17 sur 3 ans). On est donc à une efficacité proche de la dapagliflozine et de l'empagliflozine dans cette indication.

 

3/ Infectiologie

La HAS a mis à jour des recommandations sur la vaccination contre le Mpox en recommandant la vaccination chez les personnes HSH et trans avec rapports multiples, les personnes en situation de prostitution, les professionnels des lieux de rencontre sexuelle et l'entourage proche de toutes ces personnes. Il s'agit de 2 doses de vaccin MVA-BN (Imvanex® ou Jynneos®) espacées de 28j (1 seule dose si antécédent de vaccin variole et 3 doses si immunodépression). Une dose de rappel est proposée aux patients vaccinés complètement il y a plus de 2 ans

La HAS revient sur le traitement pré-exposition de l'infection à VIH (PrEP). Le principal changement est l'ajout du cabotégravir-LP (pas encore disponible) en traitement de 2ème intention: 2 injections à 1 mois d'intervalle (M0 et M1), puis tous les 2 mois (M3, M5...). A l'arrêt, un relais par TDF/FTC (tenofovir/emtricitabine) doit être entrepris (mais pas de durée indiquée). Pour la PrEP classique par TDF/FTC, on rappellera le schéma continu qui nécessite 7 jours de prise avant d'être efficace et 7 jours après le dernier rapport chez toute personne, avec possibilité, chez les personnes avec rapport anaux d'une initiation rapide avec 2 cp en 1 prise initiale 2 à 24h avant le rapport, puis à poursuivre jusqu'à 2 jours après le dernier rapport. En cas de prise discontinue, possible chez les patients avec rapport anaux c'est 2 cp avant le 1er rapport, et à poursuivre également jusqu'à 2 jours après le dernier rapport. Les cp sont à prendre à heure fixe +/- 2 heures.

Enfin, la HAS aborde aussi le traitement post exposition (TPE), qui doit être effectué dans les 48 heures suivant l'exposition (les recos internationales disent 72h...). L'algorithme ci dessous redonne les indications de TPE, en considérant que les groupes de patients avec une prévalence de VIH >1% sont : certains pays Afrique subsaharienne, et la Guyane, les usagers de drogue intraveineuse, l'activité sexuelle en groupe ou sous produits psychoactifs et les violences sexuelles. Dans le cadre d'une exposition au sang, l'indication du TPE est limitée aux situations de partages d'aiguilles ou de seringues si situation du patient contact non connue et un peu plus large si patient VIH avec > 50 copies/mL. Quelle que soit l'exposition, il n'est pas recommandé de prescrire un TPE si patient VIH avec CV < 50 copies/mL. Enfin, la doxycycline en post exposition n'est pas recommandée (contrairement à ce que recommandent les américains).


4/ Oncologie

Annals of internal medicine a publié une étude intéressante à l'heure où les US abaissent le dépistage du cancer du sein à 40 ans. En effet, les auteurs ont inclus des femmes de  40 à 73 ans participant du dépistage par mammographie. Ils ont trouvé qu'après un résultat faux positif ayant conclu à des examens complémentaires, les patientes participaient moins au dépistage par la suite (par rapport à des patientes avec une mammographie vraie négative): -2% de façon globale, mais -15% pour le suivi à court terme, et  -10% après une biopsie. A méditer lorsuqu'on souhaite faire davantage de mammo en augmentant plus le risque de faux positifs que le risque de vrais positifs.


5/ Rhumatologie

Ca faisait un moment qu'on n'avait pas parlé d'acuponcture. Cet essai randomisé a évalué l'acupuncture versus acupuncture factice versus liste d'attente dans les cervicalgies. Que ce soit à 1 mois ou 6 mois de l'intervention, l'acupuncture était statistiquement efficace, réduisant l'EVA de 6 points sur 100 par rapport au groupe acupuncture factice et de presque 10 points sur 100 par rapport à la liste d'attente. Cependant, les auteurs reconnaissent que cette différence est inférieure au seuil de pertinence clinique (fixé à 10 points).


6/ Endocrinologie

Le NICE a publié des recommandations sur l'insuffisance surrénalienne.  Elle peut être suspectée devant une grande variété de symptômes: perte de poids/AEG, appétence pour le sel, hyponatrémie, hyperkaliémie, hypoglycémie (surtout chez l'enfant), hypotension, puberté précoce, ralentissement staturo-pondéral chez l'enfant... Les facteurs de risque sont une maladie auto-immune, un traitement par corticoïdes en cours ou interrompu, ou la prise d'opioïdes. L'examen de 1ère intention est un cortisol sanguin à 8h: < 150nmol/L : certain, entre 150 et 300nmol/L: incertain, > 300nmol/L: exclu. Le traitement repose sur de l'hydrocortisone 15 à 25mg/j en 2-4 prises chez l'adulte. Dans les causes primaires ou congénitales, la flutrocortisone peut être proposée en plus pour soulager les symptômes et normalises le ionogramme (50µg initialement et ajuster jusqu'à 300 si besoin). Un kit d'urgence de 100mg d'hydrocortisone injectable doit être prescrit avec la conduite à tenir rédigée. En cas de stress aigu, augmenter l'hydrocortisone à 40mg/jour en 2-4 prises, ou prendre 10mg de prednisone par jour en 1 ou 2 prise. Dans la prévention de l'insuffisance surénalienne chez les patients sous corticoïdes au long cours, il faut d'abord atteindre progressivement les doses physiologiques (3-5mg de prednisone chez l'adulte), puis prendre la dose 1 jour sur 2 pendant 2 semaines, puis seulement  2 fois par semaine pendant 2 semaines puis arrêter (ici: d'autres protocoles de décroissances progressive). Enfin, il n'est recommandé de faire un test avant l'arrêt qu'en cas de dose infra physiologique associée à une apparition de symptômes. Il faut alors doser le cortisol à 8h, 24h après la dernière prise de corticoïdes (interprétation identique à ci dessus: arrêt du cortico si > 300) Ils ne parle pas de test de stimulation à l'ACTH dans cette reco, qui pourrait avoir sa place en cas de corticol "incertain" d'après d'autres recommandations.

Faisons un point sur le surtraitement du diabète chez les patients de plus de 75 ans sous insuline. Cette étude a comparé d'une part, les objectifs standardisés (surtraitement = HbA1c <7%) et des objectifs personnalisés (surtraitement = HbA1c < 7%, 7,5% ou 8% selon le patient) par rapport aux données obtenues par une mesure continue du glucose (surtraitement  = temps inférieur à la cible > 1%, ce qui correspond à 15min/jour en hypoglycémie). Les auteures montrent que 15% à 40% des patients sont surtraités par rapport aux cibles d'HbA1c et que quasiment tous les patients le sont selon la mesure continue du glucose. Dans tous les cas, aucune des définitions du surtraitement n'était suffisamment sensible ou précise pour prédire le risque d'hypoglycémies.

 

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vendredi 6 septembre 2024

Dragi Webdo n°451: Recos #ESC (HTA, artériopathies périphériques, coronaropathies, FA), contraception (recos US), syncopes de l'enfant, psychédéliques, A-GLP1/I-SLT2, Dinner in Paris

Bonjour, ce sera un double Dragi Webdo cette semaine ! En effet, c'est le congrès européen de cardiologie, alors, il y aura beaucoup de cardiologie cette semaine (enfin, encore plus que d'habitude...). Bonne lecture !

 

1/ Pharmacovigilance

L'ANSM fait un rappel des indications et des risques des crayons au nitrate d'argent. Ils ne doivent pas être utilisés pour traiter des verrues ni être appliqués sur des muqueuses, près des yeux ou sur peau saine. Pour mémoire, dans le granulome ombilical du nourrisson, une application d'une pincée de sel de table ou de cuisson avec occlusion pendant 30min, 2 fois par jours pendant 3 jours est un traitement efficace sans effet secondaire démontré.

On le savait déjà, mais une nouvelle étude de cohorte incluant plus de 600 000 enfants ne retrouve pas d'association entre vaccin ROR et autisme.

 

2/ Cardiovasculaire

2.1/ Commençons avec les recommandations ESC concernant l'HTA (les précédentes datant de 2018). On va passer vite sur les choses qui ne changent pas, mais globalement il y a encore une mouvance vers un traitement plus précoce et plus intensif chez la majorité des patients (assez critiquable quand on compare à d'autres recos. Une méthode GRADE basée sur des revues systématiques n'aurait probablement pas les mêmes conclusions)

- Le diagnostic nécessite idéalement des mesures ambulatoires > 135/85mmHg. Le dépistage est recommandé tous les 3 ans ou tous les ans après 40 ans, et doit être effectué aux 2 bras, une différence > 10mmHg de PAS étant associé à un sur-risque CV et peut faire suspecter une sténose (toute mesure ultérieure doit être faite au bras avec la PAS la plus élevée). 

- Cette PA est à utiliser pour calculer le risque CV des patients avec le SCORE-2, SCORE-2 OP et SCORE-2 diabète. Les auteurs rajoutent que: pré-éclampsie, HTA gravidique, diabète gestationnel, accouchement prématuré, enfant mort né, fausses couches récurrentes, ATCD familiaux CV précoces, faible niveau socio-économique, maladies mentales, VIH et maladies auto-immunes, sont des facteurs modifiant le risque en "l'augmentant d'une catégorie" (faisant ainsi passer des patients intermédiaires à élevés, grade IIa). En grade IIb (avis d'expert sur études observationnelles), le score calcique, troponine ultrasensible, écho des TSA peuvent être des facteurs modifiant également. Et on arrive à une première nouveauté: pour les patients considérés à haut risque cardiovasculaire (prévention secondaire ou >10% ou intermédiaire + facteurs modificateurs), il y a une indication de traitement si PAS > 130/80 mmHg! 

- Le bilan initial standard comporte: NFS, Na, K, calcémie, TSH, EAL, GAJ, créatininémie, rapport albuminurie/créatininurie (RAC) et ECG. Un bilan d'HTA secondaire chez un spécialiste est indiqué si HTA < 40 ans ou HTA résistante (à noter que avant 40 ans, en cas d'obésité, il faut commencer par une recherche de SAOS avant le bilan d'HTA résistante)

- La cible tensionnelle est < 130mmHg pour tout le monde, sauf espérance de vie limitée ou âge > 85 ans pour laquelle la cible est < 140mmHg (on a déjà parlé de nombreuses fois de ces cibles avec un bénéfice peu éprouvé pour tout ce qui est plus strict que 140/90, cf iciet ici)

- Concernant la prise en charge, rien de neuf dans les RHD (activité physique, sevrage tabac, OH limité, selon les recos OMS), sauf concernant HTA et insuffisance rénale où ils recommandent avec un grade IIa d'augmenter de 0,5-1g/j les apports potassiques, notamment avec les fruits et légumes. 

- Sur le plan pharmacologique, une monothérapie est recommandée si TA < 140/90mmHg, fragilité, hypotension orthostatique ou >85 ans. Sinon, une bithérapie faible dose est recommandée parmi les 3 classes possibles (IEC/ARAII, diurétiques, calciques). En cas d'HTA résistante (à une trithérapie maximale), la spironolactone est recommandée (si inefficace: éplérénone, puis les bêtabloquants puis les centraux ou alphabloquants).

- En cas de grossesse, la nifédipine LP, le labétalol et le methyldopa sont les traitements recommandés, avec une cible < 140/90mmHg. En cas d'insuffisance rénale et HTA, les ISGLT2 sont indiqués tant que le DFG est supérieur à 20mg/mL. Chez les patients d'origine africaine sub-saharienne, une bithérapie avec calciques + thiazidique ou iec/araII est recommandée.

En bref, pas de revue systématique, des grades ne correspondant pas vraiment au niveau de preuve, pas d'analyse plus fine des classes à privilégier selon les patients. On est dans la continuité des recos de la société européenne d'HTA (recos  2023) et des recos américaines, les recos de la société internationale d'HTA de 2020 étaient plus précises, plus utiles et un peu mieux sourcées.


2.2/ On passe aux recos ESC sur les artériopathies périphériques. On se concentrera sur les carotides, l'aorte et les membres inférieurs (mais il y a aussi des spécificités décrites pour les sténoses sous clavière, et les patients avec syndromes de Turner, Marfan et Elher Danlos).

- Concernant l'aorte abdominale, le dépistage est recommandé à 65 ans en cas d'antécédent de tabagisme ou à 50 ans en cas d'antécédent familial au 1er degré par Doppler avec une surveillance tous les 3 ans si diamètre >30mm et annuelle dès 40mm. Les indications chirurgicales sont > 45mm chez la femme et >50mm chez l'homme.

- Concernant l'AOMI, le dépistage  se fait via l'IPS. Il normal est entre 1 et 1,4 ; il est borderline entre 0,9 et 1, et pathologique < 0,9 ou > 1,4 et une confirmation par Doppler est recommandée. Il est suggéré de dépister (grade IIa) les patients de plus de 65 ans avec FDRCV. Il est recommandé d'évaluer le risque d'amputation avec le score Wound, Ischemia, Foot Infection (WIFI) (cet acronyme n'est pas là pour vérifier que vous suiviez toujours même si c'est un bon test de lecture...). L'aspirine 75-100mg est recommandée chez les patients avec AOMI symptomatiques (grade I) et suggérée si asymptomatiques (IIb). Une bithérapie aspirine+rivaroxaban 2.5x2/j est suggérée si faible risque hémorragique (IIa). Le clopidogrel peut être préféré à l'aspirine (IIb). En cas d'indication autre à un anticoagulant, un AOD seul est suggéré (IIb). La revascularisation dépend des symptômes: elle n'est indiquée que pour améliorer les symptômes majeurs apres échec de rééducation supervisée et du traitement medical.

- Concernant les carotides, il est recommandé de diagnostiquer les sténoses par un Doppler avec la méthode NASCET et il est recommandé de ne pas utiliser la méthode ECST. Concernant l'antiaggrégation, elle est recommandée (grade I) si sténose symptomatique (=AVC/AIT) avec une bithérapie aspirine-clopidogrel pour 21 jours suivis d'une monothérapie. En cas de sténose asymptomatique >50% NASCET, une monothérapie peut être considérés si le risque hémorragique est faible (on est très loin de l'aspirine chez tous les patients avec des "plaques"). La revascularisation est indiquée si sténose symptomatique >70% (grade I) ou à discuter en RCP si >60% asymptomatique (IIb) et non indiqués si occlusion.

Sur le plan thérapeutique, c'est globalement pareil pour tous: RHD avec sevrage tabagique et activité physique. La cible tensionnelle est de 130/80, en privilégiant les IEC/ARAII (grade IIa) y compris si sténose unilatérale des artères rénales voire bilatérale si une surveillance rapprochée est possible (IIb). Une statine est indiquée chez tous les patients avec artériopathie périphérique, notamment pour obtenir une baisse de 50% du LDLc et un LDLc < 0,55g/L (grade I mais en fait totalement extrapolé des essais sur les coronarographies et AVC). Si insuffisant, l'ezetimibe est à ajouter, et il est recommandé de ne pas prescrire de fibrates. Chez les diabétiques, ISGLT2 et AGLP1 sont indiqués et la metformine est un traitement de 2ème ligne si besoin d'ajouter un traitement pour contrôler la glycémie (un jour, peut être, on pourra suivre cette reco en France!).


Pour revenir sur la place du rivaroxaban en plus de l'aspirine dans l'AOMI, cet essai randomisé retrouve que la bithérapie augmente la distance de marche à 6 minutes de 70 mètres (250m avant traitement, puis 332m vs 271m). Rappelons que dans les grand essais (Compass), pour une réduction des évènements CV avec un NNT de 50 et des ischémies de membre inférieur de 90, il y avait un saignement majeur avec un NNH de 85 patients....


2.3/ On passe aux recos ESC sur la fibrillation auriculaire. Un dépistage par ECG est recommandé chez tous les patients de plus de 65 ans (grade I, niveau de preuve C = "on a pas d'études qui le montre mais on veut dire ça" . On avait en effet vu ici et que le dépistage par ECG est inutile). Le diagnostic est posé sur l'ECG (la notion de durée d'au moins 30 secondes à été supprimée de la définition, ils disent juste que si c'est > 30 secondes, il peut y avoir des implications cliniques). L'ETT est recommandée dans l'évaluation de la FA pour recherche d'une cause valvulaire, et un bilan initial comprend: NFS, Na, K, créatininémie, bilan hépatique, TSH et glycémie à jeun. La prise en charge repose sur le CARE: 

  • Comorbidity: traitement des poussées d'insuffisance cardiaque, contrôle PA, glycémique, activité physique pour perte de poids, arrêt de l'alcool
  • Avoid stroke: évaluation par le CHA2DS 2-VA (oui, le Sc pour sexe a été supprimé) et anticoagulation si 2 ( grade I) ou = 1 (grade IIa). Les AOD sont recommandés en 1ère intention (c'est pas dedans mais on a déja vu que l'apixaban avait la meilleure balance bénéfice/risque). Un patient sous AVK bien contrôlé n'a pas besoin d'être switché vers un AOD. Les scores de risque de saignement permettent d'évaluer ce risque mais ne doivent pas être utilisés strictement pour stopper une anticoagulation. L'aspirine n'est jamais une alternative. En cas de coronaropathie, la trithérapie aspirine+clopidogrel+AOD ne dépasse jamais 1 mois, puis la bithérapie clopidogrel+ AOD jusqu'à 6 mois si traitement de coronaropathie stable et 12 mois si SCA avant de poursuivre par AOD seul.
  • Reduce symptomes by rhythm or rate control: chez un patient hémodynamiquement stable, un contrôle de fréquence est à initier (grade I) par bêtabloquant ou digoxine ou verapamil/diltiazem (seulement si FE > 40% pour les calciques) ou une combinaison si symptômes persistants. La cible de FC est  < 110/min avec un contrôle plus strict si symptômes ou une cardioversion sera proposés en cas de persistance de symptômes. En cas de FA paroxystique (<7j) ou persistante (>7j), à nouveau sinusal, un contrôle de rythme est à proposer dans le cadre d'une décision partagée avec les patients (Grade I) avec amiodarone si cardiopathie (coronaropathie ou FE < 50%) ou flécaine sinon. En cas d'échec du traitement médicamenteux et après décision partagée, une ablation est recommandée
  •  Evaluation : surveillance et réévaluation.


2.4/ Enfin, parlons des coronaropathies stables dans ces dernières recos ESC.

- Tout d'abord, un ECG est recommandé devant toute douleur thoracique à moins qu'une cause non cardiaque évidente soit identifiée. Une évaluation opportuniste du risque cardiovasculaire avec les SCORE2/SCORE2-OP est recommandée lors des consultations en étant éventuellement précisé par un score calcique ou un Doppler des TSA (grade IIb). Le risque cardiovasculaire des patients chez lesquels une coronaropathie est suspecté doit être évalué et le bilan initial comporte: NFS, créatininémie, EAL, GAJ, TSH (et éventuellement une CRP ultrasensible et parfois une RXT, grade IIa). 

- La probabilité clinique de coronaropathie est à évaluer selon le score Risk Factor-weighted Clinical Likelihood model (cf ci-dessous). Si le score est <5%, les explorations complémentaires peuvent être différées, entre 5 et 15% un score calcique est recommandé (IIa) pour ajuster le score précédent ou un ECG d'effort (IIb). Dans tous les cas si la suspicion se confirme, une ETT est recommandée. Malgré tout cela, on voit quand même écrit que l'ECG d'effort est recommandé pour évaluer les symptômes, l’arythmie, la réponse tensionnelle à l'exercice (classe 1, grade C = on veut, mais il n'y a pas d'étude qui en montre l'intérêt) ou quand les imageries non invasives ne sont pas disponibles (IIb). 

- Bref, ce qui est recommandé chez les patients à risque très faible (<5%): rien. Chez les patients à risque faible (5-15%): coroscanner. Chez les patients à risque modéré  (15-50%) : coroscanner ou au mieux un test fonctionnel et notamment l'échographie de stress ou un TEP de perfusion myocardique (ou sinon une scintigraphie de perfusion myocardique ou une IRM cardiaque). Chez les patients à risque  élevé (50-85%): test  fonctionnel. Chez les patients à risque très élevé : la coronarographie est indiquée (ou après les examens non invasifs) et ils recommandent d'utiliser la FFR (on en avait parlé ici, c'est la fraction flow reserve qui estime l'importance d'une sténose) avec un seuil < 0,8 (avec un grade I alors que les études sont quand mêmes pas folles). 

Sur le plan thérapeutique, la symptomatologie peut être soulagée par des bêta-bloquants ou des calciques non bradycardisants (grade I) ou une combinaison des 2 si besoin voire en ajoutant des nitrés de longue durée d'action (IIa). L'ivabradine est suggérée (IIa) si persistance des symptômes en cas de FE < 40% (et pas si FE > 40%) voire du nicorandil (IIb).  Concernant l'anti-aggrégation après revascularisation, une bi-antiaggrégation (notamment aspirine + clopidogrel) est recommandée pendant 6 mois avant une monothérapie par l'un ou l'autre. La bithérapie peut être limitée à 1-3 mois en cas de haut risque hémorragique (grade I) et prolongée pendant plus de 6 mois si risque hémorragique faible et haut risque de récidive (IIa). En l'absence d'infarctus ou de revascularisation, l'aspirine est recommandée en cas d'obstruction coronaire significative (grade I mais ils disent en intro qu'ils ne sont pas tous d'accord sur ce qu'est une obstruction significative, probablement 50% sur le vaisseau gauche dominant ou 70% sur plusieurs vaisseaux à la coronarographie). Les IPP sont recommandés en cas de bithérapie et "selon le risque individuel du patient" en cas de monothérapie (ce qui ne veut rien dire de concret). Une statine à la plus forte dose tolérée est recommandée pour atteindre un LDL < 0.55g/L et une diminution de 50% du taux, avec ajout d'ezetimibe (ou d'anti pcsk9 si besoin). Et si il y a des récidives malgré ça, la cible passe à 0.4g/L (grade IIb)! Pour en revenir au "BASIC" appris pendant l'externat, les IEC sont recommandés si HTA, diabète ou insuffisance cardiaque et suggérés en l'absence de ces conditions (IIb). En complément, la colchicine 0.5mg/j est proposée en prévention secondaire (IIb). Chez les patients diabétiques un isglt2 ou un aglp1 est recommandé indépendamment de l'HbA1c. 



On avait déjà parlé (ici et ) de l'arrêt des bêta bloquants après un infarctus et de leur non indication dans les recommandations ESC en l'absence de FEVG altérée même si les recos coronaropathies stables ci dessus les placent en 1ère ligne pour soulager les symptômes . Cet essai randomisé français a évalué l'arrêt des bêta bloquants chez des patients avec antécédent d'infarctus, mais FEVG > 40% et pas d'évènements cardiovasculaires depuis au moins de 6 mois. Plus de 3000 patients ont été randomisés, leur dernière évènement CV datait de 3 ans en moyenne et ils ont été suivi pendant environ 3 ans après randomisation. Il y a eu 23,8% d'évènements dans le groupe déprescription versus 21,1% dans le groupe maintien du bêta bloquant, ce qui n'a pas permis d’établir la non infériorité de la déprescription! Donc les études étant divergentes mais de plus en plus nombreuses, une revue systématique va être nécessaire!


3/ Pédiatrie

Des recommandations pédiatriques chinoises sur les syncopes ont été publiées. L'entretien et l'examen clinique associés à un ECG permettent d'établir le diagnostic des syncopes situationnelles, hypotension/hypertension orthostatiques, tachycardie posturale orthostatique, et syncope iatrogène. Il permet aussi de suspecter des causes comme HTAP, cardiomyopathies, cardiopathies cyanogènes et arythmies pour lesquels un bilan complémentaire sera nécessaire. Les causes encore indéterminées devront être explorées en service spécialisé notamment avant de conclure à une syncope vagale.


4/ Gynécologie

Le CDC américain a publié des nouvelles recommandations concernant les contraceptions. 

- Quelle que soit la contraception choisie, l'examen des seins n'est pas recommandé chez une patiente asymptomatique avant de l'initier ni aucun examen sanguin, et l'examen pelvien n'est recommandé que si DIU. Les contraceptions sont utiles jusqu'à ce que la ménopause soit établie, et aucun test biologique n'est suffisamment fiable pour poser le diagnostic.

- DIU:  Les auteurs rappellent que la pose est efficace et sure dans les 48 heures après un accouchement et que DIU peut être placé n'importe quand dans le cycle du moment que le risque de grossesse en cours peut être "raisonnablement exclu". L'application de lidocaine avant la pose d'un DIU pourrait diminuer la douleur des patientes avec un bloc paracervical en 2 injection ou en topique (spray ou gel, délai d'action 7-15min selon les études), et que le misoprostol ne doit pas être utilisé pour faciliter la pose...... Un examen clinique bimanuel est recommandé avant la pose pour "saisir la position du col" et vérifier qu'il n'y ait pas de signes clinique d'infection. Une recherche de chlamydia et gonocoque est recommandée avant ou au moment de la pose. En cas d'infection génitale haute, il est nécessaire de retirer le DIU seulement en l'absence d'amélioration clinique à 48-72h. En cas de grossesse sur DIU, il est recommandé de retirer le DIU (surrisque de FCS et d'accouchement prématuré, mais le retrait ne fait pas baisser le risque au niveau des grossesses sans DIU).

- Les auteurs proposent les auto-injections d'acétate de médroxyprogestérone pour faciliter ce type de contraception. Un retard de moins de 15 jours sur l'injection n'entraine pas de sur-risque de grossesse.

- Concernant les contraceptions oestro-progestatives, elles peuvent être prescrites dès 42 jours post-partum (mais si absence d'allaitement et de facteurs de risque CV c'est possible dès 21 jours). Le point de changement important concerne les pilules prises en retard (<24h) ou oubliées (>24h). Les auteurs considèrent que moins de 48 heures d'oubli n'entraine pas de surrisque et qu'il suffit de prendre immédiatement les comprimés oubliés. Un oubli de plus de 48h (donc de 2 pilules), entraine un surrisque qui nécessite une protection pendant 7 jours, si les oublis étaient dans les 7 derniers jours, poursuivre sans effectuer de "pause" entre les plaquettes, et si c'était dans les 7 premiers et qu'il y a eu des rapports dans les 5 jours, une contraception d'urgence est recommandée (et peut aussi l'être si jugé nécessaire quelles que soit les circonstances).

- Concernant les progestatifs, pour le norgestrel, un oubli de plus de 3 heures est à risque, et pour la drospirenone, un oubli de plus de 48h est à risque (rien sur le desogestrel).

- Concernant les contraception d'urgence par pilules, elles peuvent être prises dans les 5 jours mais moins efficaces après 3 jours. Concernant l'ulipristal, la contraception habituelle peut être reprise à J5 et immédiatement concernant le levonorgestrel. Si un vomissement survient dans les 3h après la prise, reprendre un comprimé.

- Méno-métrorragies: les contraceptifs oestro-progestatifs, l'acide tranexamique (500x2/j, 5j), les AINS et le tamoxifène sont des traitements proposés

 

5/ Endocrinologie

Cette revue systématique étudie compare l'efficacité cardiovasculaire des analogues du GLP1 seuls ou en combinaison avec un inhibiteur de SGLT2 dans le diabète de type 2. Globalement, les AGLP1 conservent leur efficacité propre sur  le risque d'hospitalisation pour insuffisance cardiaque, le risque d'aggravation rénale, mais pas sur les évènements cardiovasculaires majeurs (même taille d'effet, mais non significatif dans le groupe antérieurement sous ISGLT2).


6/ Psychiatrie

Une revue systématique du BMJ a comparé les monothérapies des traitements psychédéliques (ayahuasca, LSD, MDMA et psilocybine) avec l'escitalopram (on aurait pu trouver mieux comme comparateur) dans la dépression. L'efficacité du placebo dans les essais n'incluant que des psychédéliques était plus faible que dans ceux avec escitalopram. Ainsi, si tous les psychédéliques semblaient supérieurs au placebo dans leurs essais, seul la psilocybine forte dose était supérieure au placebo dans les essais incluant l'escitalopram. Par ailleurs, la psilocybine semblait également plus efficace que l'escitalopram, mais les tailles d'effets étaient faibles (différence de moyennes standardisées = 0,51).



7/ Le jeu du mois : "Dinner in Paris"

"Dinner in Paris" est un jeu dans lequel les joueurs vont ouvrir des restaurants sur une grande place ! Forcément, ouvrir un restaurant gastronomique rapportera plus de points qu'une friterie, mais ça coute aussi plus cher. Il faut sélectionner les ingrédients nécessaires pour ouvrir les restaurants que l'on souhaite et qui rapporteront des revenus. Avec ces revenus, on peut ensuite étendre l'influence de ses restaurants sur la place en y plaçant des terrasses : plus on pose se terrasses, plus on a de points! Les joueurs vont donc d'affronter en essayant de mieux placer ses terrasses, de bloquer le développement des terrasses des concurrents et de récupérer les bonus laissés par les pigeons (oui, ils sont aussi de la partie) C'est un jeu de stratégie assez abordable sur un thème immersif et qui procurera de très bons moments !


Voilà, c'est terminé ! Vous pouvez toujours vous abonner sur FacebookTwitter et à la newsletter (mail) pour ne rater aucun billet. Pour cela, inscrivez votre adresse mail tout en haut à droite sur la page (sans oublier de confirmer l'inscription dans le mail provenant de "hi@follow.it" et intitulé "Veuillez confirmer votre abonnement à Médicalement Geek", qui vous sera envoyé et qui peut arriver dans vos spams)

À la semaine prochaine et NON aux certificats absurdes (sauf pour les bébés nageurs en compétition aux jeux olympiques, évidemment!) !



@Dr_Agibus et @DrePetronille