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Blog médical et geek de médecine générale :
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dimanche 27 mars 2022

Dragi Webdo n°349 : Covid-19 (ciclésonide, 3ème dose), conjonctivite néonatale, e-cigarette, HTA juvénile, aspartame/cancer, anti-émétiques/AVC

Bonjour ! Encore un #CMGF2022 très sympathique et ceux qui ont manqué des présentations qui les intéressaient peuvent peut être les retrouver grâce aux #LiveTweet des Twittos sur place. Merci à @BaptouB pour la synthèse par demi-journée ici ! Encore merci à ceux qui sont venus assister à la présentation du blog et merci à tous les lecteurs ! Voici donc les actualités de la semaine, avec pas mal d'études françaises!


1/ Pharmacovigiance

La HAS recommandait d’éviter d'utiliser des anti-émétiques (cf ici). Voici une nouvelle étude publiée dans le BMJ et menée en France sur les bases de données du SNDS. Elle retrouve que l'utilisation d'anti-émétiques anti-dopaminergiques est associée à un sur-risque d'AVC (OR= 3,12). Ce risque était plus faible pour la domperidone et plus élevé pour la métopimazine,  le métoclopramide étant entre les deux.

Les risques liés aux édulcorants comme l'aspartame sont en train d'être étudiés. Cette étude française basée sur la cohorte Nutri-net, comprenant 100 000 patients suivis pendant près de 8 ans. Les consommateurs importants d'édulcorants étaient plutôt des femmes, jeunes, fumeuses, plus éduquées, faisant moins d'activité physique et avaient plus fréquemment du diabète. La consommation d'aspartame était associée à une augmentation du risque global de cancer (augmentation de 15 à 20% pour un nombre de patients prenant de l'aspartame d’environ 500 pendant 8 ans pour entrainer 1 cancer supplémentaire), de cancer du sein (augmentation de 22%) et des cancers liés à l'obésité c'est à dire ORL et digestifs (augmentation de 15 à 20%).


2/ Covid-19

L'étude Coverage a été conduite en France et a randomisé 200 patients avec Covid récent et facteurs de risque de complication en 2 bras: en ciclésonide inhalé versus contrôle. Devant l'absence de bénéfice démontré après l'inclusion de ces patients, le comité de sécurité de l'étude a demandé l'interruption de l'essai pour futilité après la première analyse intermédiaire. Ceci est concordant avec l'essai Contain qui ne retrouvait pas de bénéfice non plus.

Alors qu'une 4ème dose commence à être recommandée par l'Etat sans qu'il n'y ait d'article scientifique pour appuyer cette décision, revenons sur le bénéfice de la 3ème dose. Un essai contrôlé randomisé du NEJM étudiait donc la 3ème dose ou une dose placebo chez 10000 patients entre juillet et octobre 2021 (donc variants beta et delta). Les auteurs retrouvent que 20 à 25% des patients ont au moins 1 effet secondaire (notamment douleurs locales et fatigue). À 2 mois de l'injection, il y avait eu 6 cas dans le groupe vacciné contre 110 dans le groupe contrôle soit une efficacité de 95%. Cependant, dans aucun des groupes il n'y a eu de cas de Covid grave dans cette population de 50 ans en moyenne avec 50% des patients atteints de comorbidités.

 

3/ Cardiovasculaire

Le BMJ revient sur l'HTA juvénile, définie comme une HTA découverte avant 40 ans. Les recommandations sont notamment de dépister une HTA secondaire. Les auteurs de cet article recommandent le bilan classique de découverte d'HTA ainsi qu'une TSH et une recherche des pouls radiaux et fémoraux pour vérifier l'absence de coarctation de l'aorte. Une échographie rénale et un doppler des artères rénales sont indiqués car les anomalies du parenchyme rénal et les dysplasies fibromusculaires font partie des principales causes d'HTA à cet âge. Parmi les autres examens complémentaires requis dans la recherche d'HTA secondaires, il semblerait que la mesure des catécholamines urinaires sur 24h ne soit pas pertinente en l'absence de symptômes évocateurs de phéochromocytome ou antécédents familiaux. De même, une mesure isolée du cortisol n'est pas informative, une mesure salivaire à minuit ou un freinage minute est à préférer.


4/ Addictologie

Une revue systématique publié dans l'ERJ a publié des données faisant réfléchir sur l'e-cigarette. Les auteurs de cette revue retrouvent que l'utilisation d'e-cigarette augmente de 58% la probabilité d'arrêt du tabac par rapport à l'utilisation de substituts nicotiniques seuls. Cependant, il y avait 8 fois plus de patients toujours dépendants à la nicotine avec l'e-cigarette par rapport aux utilisateurs de substituts nicotiniques. Ainsi, arrêter ce qui est toxique dans le tabac c'est bien, mais attention à la persistance de la dépendance à la nicotine avec e-cigarette.


5/ Ophtalmologie

Enfin, le BMJ aborde les conjonctivites du nouveau né (on avait un peu abordé la question ici). Une conjonctivite néonatale est à évoquer devant tout écoulement de l’œil avant 4 semaines. Les élément clé de l'examen clinique sont: "l'oeil collé" qui signe le problème ophtalmologique et la couleur de la conjonctive (qui objective la conjonctivite infectieuse: si l’œil coule avec une conjonctive bien blanche, pas de risque de conjonctivite infectieuse). Pour les causes infectieuses survenant avant 1 mois, les auteurs sont pour adresser pour avis ophtalmologique en urgence. L'ophtalmo fera alors un prélèvement et traitera de façon empirique jusqu'à obtention des résultats des prélèvements. Comme suggéré dans l'autre article, peut être qu'on peut faire ça en ville, vu les difficultés d'accès aux ophtalmo, mais une suspicion de gonocoque, de chlamydia ou d'HSV est une indication d'hospitalisation. Voici donc les causes principales de conjonctivite infectieuses et leurs caractéristiques pour les suspecter : 

  • à 24h:  iatrogène liée au produits prophylactiques appliqués pour éviter les conjonctivites gonococciques et à Chlamydia (et dont la pertinence en routine est actuellement débattue compte tenu de la faible prévalence des complications)
  • entre 2-5 jours: gonocoque (souvent bilatéral, très purulent avec oedeme palpébral)
  • entre 5 et 12 jours: Chlamydia (cause la plus fréquente de conjonctivite, très purulent avec pseudomembranes sur la conjonctive) et HSV (conjonctive modérément rouge mais test à la fluorescéine peut aider au diagnostic)
  • variable: Pseudomonas aeruginosa et autres bactéries.
  • obstruction congénitale du canal lacrymal: cas à part d’œil collé, sans signe infectieux. C'est rassurant et ne nécessite pas d'intervention avant l'âge de 1 an si persistance (sauf apparition d'une dacryocystite infectieuse qui est une urgence ophtalmo).


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A la semaine prochaine,

@Dr_Agibus (et @DrePetronille pour la relecture)

10 commentaires:

  1. " À 2 mois de l'injection, il y avait eu 6 cas dans le groupe vacciné contre 110 dans le groupe contrôle soit une efficacité de 95%. Cependant, dans aucun des groupes il n'y a eu de cas de Covid grave dans cette population de 50 ans en moyenne avec 50% des patients atteints de comorbidités."
    Si je comprends bien, le vaccin est donc très efficace pour éviter une maladie bénigne.

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    1. Vous comprenez peut-être bien mais exprimez mal. La dose de rappel est très efficace pour prolonger la protection contre une infection Covid chez des patients précédemment vaccinés mais l'étude, en raison d'une moyenne d'âge jeune et d'un effectif faible n'a pas permis de démontrer une différence sur la survenue de forme grave. Par ailleurs, elle ne tiens pas compte de l'émergence du variant omicron puisque réalisée avant.

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  2. Bonsoir @Anonyme
    "La dose de rappel est très efficace pour prolonger la protection contre une infection Covid chez des patients précédemment vaccinés "
    Vous basez cette affirmation sur les 95% annoncés qui est un chiffre en pourcentage relatif.
    Si je calcule en pourcentage absolu, ce qui est une vraie représentation de la réalité, les chiffres relatifs ayant pour but de biaiser le raisonnement des médecins en se basant sur leur inumérisme, le bénéfice n'est plus alors que de 2%.
    2% de bénéfice en pourcentage absolu, c'est faible et donc ne peut pas recevoir le qualificatif de "très efficace".

    Concernant cette utilisation des %ages relatifs en lieu et place des pourcentages absolus, a été l'objet d'un article du Jama concernant les statines dont ce blog c'est l'écho la semaine dernière.

    Également un texte de 2017 qui signalait cette problématique :
    https://web.archive.org/web/20170623084247/http://hippocrate-et-pindare.fr/2017/01/01/resolution-2017-non-au-risque-relatif-oui-au-risque-absolu/

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  3. Ce que je trouve surprenant c'est qu'à aucun moment sur ce blog, il n'est signalé que ce chiffre de 95% est un chiffre relatif et non absolu alors que l'auteur signale régulièrement la problématique de l'expression des chiffres relatifs.
    Cela devrait être systématique dans le compte rendu des études qui sont ici rapportés.

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    1. Bonsoir, effectivement, il n'y a pas eu de formes graves car la population ne s'y prêtait pas: pas assez grave? pas assez nombreuse? D'autres études populationnelles ont retrouvé un bénéfice de cette 3ème dose. Le débat reste donc ouvert sur la pertinence clinique d'une différence faible au niveau populationnelle mais peut être importante au niveau individuelle dans un groupe de patient plus à risque.
      L'efficacité vaccinale est donnée en chiffres relatifs en effet car c'est comme ça qu'est définie la notion. Mais bien évidemment, les chiffres absolus sont notés: 6/2500 vs 110/2500 cas de forme symptomatique non grave. Merci pour les débats et les précisions apportées ^^

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  4. Remarque : il y a eu 5081 participant dans le bras vacciné et 5044 dans le bras placébo et non 2500 comme vous l'indiquez.
    Les chiffres absolus sont donc 6/5088 et 110/5044 .
    En effet il y a eu plus de 10000 participants divisés en groupe vacciné et placebo. Cela fait malgré tout une cohorte importante.

    Je ne conteste pas le bénéfice du vaccin ni son intérêt probable dans les groupes à risque.

    Mon propos est de "pointer du doigt" un chiffre de 95% qui laisse à penser un bénéfice important et un vaccin très efficace, comme l'exprime @anonyme alors que la réalité est d'un tout autre ordre.
    En effet raisonner avec un chiffre de 95% de bénéfice en lieu et place de 2%, c'est commettre une grave erreur.
    Le relatif ne représente pas la "réalité" comme le fait l'absolu.
    Ici par exemple le pourcentage relatif se calcule sur un ordre d'idée d'une centaine de patients alors que l'absolu prend en compte l'ensemble des participants.

    Pour ce problème d'innumérisme évoqué dans mon commentaire et qui touche énormément de médecins, je voudrais renvoyer tous les lecteur de votre blog à la lecture du livre de GIGERENZER: "Penser le risque, apprendre à vivre dans l'incertitude"
    Ce livre est absolument essentiel et devrait faire partie de l'enseignement de la médecine.
    Personnellement il a changé ma vision des chiffres statistiques donnés dans les études cliniques et m'a fait comprendre combien il était important de parler en pourcentage absolu et jamais en pourcentage relatif.
    Or c'est tout le contraire qui se passe, comme en témoigne à nouveau l'étude objet de nos échanges.

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    1. Effectivement c'est 5000 patients par groupe, j'ai modifié dans l'article. Je suis bien évidemment d'accord avec votre commentaire par ailleurs. Merci

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  5. Dans la suite de nos échanges, j'ai été interpelé par un tweet de notre ministre de la santé datant du 26 mars 2022 où il écrit ceci : "Le savez-vous ?
    Il existe désormais un traitement efficace contre la covid-19. Il réduit de 85% le risque d'hospitalisation et de décès.
    Si vous êtes âgé de +65 ans ou malade et que vous venez de contracter la Covid, avec des symptômes, n'hésitez pas à en parler à votre médecin."

    Ce médicament "miracle" (non cité) qui réduirait ainsi le risque d'hospitalisation et de décès , c'est le Paxlovid de Pfizer : https://www.bmj.com/content/375/bmj.n2713.long

    Ici, encore une fois, la présentation de notre ministre est trompeuse car elle reprend des pourcentages relatifs.

    J'ai eu la curiosité de calculer en pourcentage absolu qui, nous l'avons vu, est une présentation correcte de la réalité.
    Le bénéfice en pourcentage absolu est de 6%.
    Les patients qui sont mis sous Paxlovid recommandé par l'HAS ont un bénéfice en réalité de 6% et non de 85% comme le ministre de la santé en fait la présentation.

    Que penser de l'attitude d'une autorité de santé comme le ministre de la santé.
    Il ne peut ignorer la différence entre pourcentage relatif et pourcentage absolu.

    Rien ne changera tant que de telles communications seront la norme.
    Qui plus est de la part des hautes autorités sanitaires de notre pays.

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    1. Bonjour, on a décrit l'étude ici: https://www.medicalement-geek.com/2022/01/dragi-webdo-n340.html . 6% semble peu, mais ça fait un NNT à 16, ce qui est plutôt très bien. Cependant l'étude a plusieurs problèmes quant à son applicabilité: population immunisée à 50% seuilement (ce qui n'est plus le cas maintenant), pas pendant le variant omicron qui avec la vaccination est moins sévère, nombreuses interactions limitant les patients éligibles, difficultés de prescription... Bref, dans le contexte où ça a été testé, c'est pas mal, mais en situation réelle actuelle, la pertinence est fortement réduite.

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  6. Bonsoir

    Nous sommes globalement d'accord :-))

    Un NNT à 16 est en effet globalement "plutôt très bien" quand on compare à de nombreux traitements "habituels" qui ont des NNT plus importants (pour mémoire une statine NNT à 83).

    Il n'en demeure pas moins que personnellement je considère que traiter 16 patients pour avoir un effet positif sur 1 seul n'est pas si "bien" que cela.
    En effet, par voie de conséquence cela fait que 15 patients seront traités sans bénéfice, et l'on retombe bien sur mon chiffre de 6% de bénéfice.
    Nous sommes sur les mêmes valeurs mais exprimées différemment.

    Nous revenons donc à notre perception des chiffres et à notre fameux "innumérisme".

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