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Blog médical et geek de médecine générale :
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lundi 25 septembre 2023

Dragi Webdo n°411 : épaule douloureuse (reco HAS), strepto A (HCSP), HTA gravidique (USPSTF), cannabis médicial, DMLA, risque hémorragique (DOAC score), mammo < 50 ans, sinusite enfant

Bonjour ! Après 2 billets plutôt courts, les revues ont repris leurs activités, voici un billet plus long ! Commençons avec un article portant sur les situations où les généralistes ont été trop lents pour adresser des patients atteints de cancer vers le spécialiste, lors du diagnostic. Dans cette étude qualitative, les 158 généralistes européens interrogés ont expliqué ces retards de prise en charge par 1/ des symptômes peu évocateurs  2/ des facteurs parasites ont réduit la suspicion de cancer (difficultés relationnelles, symptômes attribués à une anxiété ancienne) 2/ l'hésitation des patients qui a retardé le diagnostic (oubli de réalisation d'un examen) 4/ les éléments contextuels qui n'ont pas permis un diagnostic rapide (délai de RDV de l'avis spécialisé). Malgré ces retards de prise en charge indépendants des propositions des généralistes, les médecins avaient le sentiment d'avoir fait une erreur dans la prise en charge. Bonne lecture pour la suite !

 

1/ Pharmacovigilance

L'ANSM revient sur la miansérine, antidépresseur couramment utilisé chez le sujet âgé et rappelle que son indication est bien la dépression et non les troubles du sommeil. Ses effets indésirables potentiellement graves sont des somnolences, des agranulocytoses, des hépatites, des convulsions et un risque suicidaire augmenté.

Après son évaluation dans les douleurs (cf ici),  le BMJ a publié une revue concernant la balance bénéfice/risque des cannabinoïdes médicaux de façon plus large grâce a une revue systématique intégrant 101 méta-analyses. De façon générale, chez des patients atteints de troubles douloureux ou de diverses pathologies (sclérose en plaques, douleur chronique, maladies inflammatoires de l'intestin et médecine palliative), les cannabinoïdes médicaux améliorent les nausées et vomissements, la douleur (-30%), la spasticité et parfois la qualité de vie. Cependant, ils augmentent les troubles du système nerveux central (x3), les troubles psychologiques (x3), les troubles visuels (x3), les troubles digestifs non spécifiques et la somnolence. De plus, le cannabidiol a un effet anti-épileptique (-50% de crises) mais augmente le risque de pneumopathie, de somnolence et de troubles digestifs. En population générale, les cannabinoïdes augmentent les accidents de voiture (+20%), les symptômes psychotiques (x5) et plus globalement les symptômes psychiatriques (x7) mais diminuent la sensation douloureuse et le sentiment de déplaisir. Chez la femme enceinte, des RCIU et des troubles néonataux ont été retrouvés. Au total, les cannabinoïdes sont dangereux en l'absence de maladie ou en cas de trouble psychiatrique, mais peuvent avoir leur utilité dans certaines maladies douloureuses et l'épilepsie au prix d'effets indésirables non négligeables.


2/ Cardiovasculaire

Un article de circulation propose un nouveau score pour classifier le risque hémorragique, spécifiquement chez les patients prenant un AOD : le DOAC score (le HAS-BLED ayant été élaboré pour des patients traités par warfarine). Il s'échelonne entre 0 (risque très faible) et 10 (risque élevé, même si le score peut être > 10 il est ramené à 10). Le score peut être très faible (0-3) : risque de saignement globalement < 1% par an, faible (4-5) : risque < 2% par an, modéré (6-7): risque <3.5% par an,  élevé (8-9): risque < entre 3% et  7% par an, et très élevé (10): risque entre 3,7% et 14% par an (les fourchettes de pourcentages sont liées aux différentes études et se chevauchent parfois)


3/ Infectiologie

Le HCSP a mis à jour sa conduite à tenir autour d'un cas d'infection à streptocoque du groupe A. Après des rappels cliniques sur les infections invasives (IISGA) et non invasives, et les définitions des sujets contact des IISGA (même domicile/chambre/locaux communs, contacts intimes en face à face y compris aux sports de corps à corps (combat, rugby), contacts répétés contigus (voyage > 8h, voisins de classe) ), et des cas groupés : au moins 2 cas confirmés microbiologiquement dans une période de 10 jours et la mise en évidence de contacts rapprochés entre les cas. Concernant les cas contact d'IISGA, une antibioprophylaxie est proposée pour les populations à risque (femmes enceintes et post-partum, nouveau-nés, âge > 65 ans, grande précarité, varicelle dans les 7 jours précédemment et sujets contact partageant le toit d'une personne ayant besoin d'une antibioprophylaxie) : amox/macrolides/C1G sont des options thérapeutiques. En cas de cas groupés d'IIASGA, une déclaration obligatoire à l'ARS est indispensable pour mettre en place les éléments de gestion d'épidémie. En parallèle, il faut communiquer auprès des personnes, améliorer l'hygiène personnelle et environnementale, éviction de la collectivité 24h après le début de l'antibiothérapie, promouvoir la vaccination varicelle si épidémie concomitante, éviction des viroses respiratoires concomitantes. La prise en charge des infections non invasives (angines notamment) ne semble pas modifiée.

Dans une étude de cohorte rétrospective, 200 000 enfants et adolescents traités par antibiothérapie orale dans le cadre d’une sinusite ont été appariés pour comparer l'efficacité la tolérance d'un traitement par amoxiciline versus amoxicilline + acide clavulanique. Les auteurs ne retrouvent pas de différence d'efficacité entre les deux antibiothérapies mais une augmentation des effets indésirables avec amoxicilline + acide clavulanique (notamment troubles digestifs et mycoses vaginales).

Alors que l'incidence du Covid remonte, un essai randomisé a comparé la fluticasone inhalée versus placebo dans les infections à Covid non sévère. Le traitement inhalé ne réduisait pas la durée des symptômes. En revanche, le risque d'hospitalisation ou de recours aux urgences ou de consultation urgente ou de décès était significativement augmenté (NNH=62). C'est concordant avec l'absence d'efficacité franche des autres traitements par corticoïdes inhalés (ciclesonide et budesonide), malgré quelques résultats initialement encourageants (Il ne faut donc pas se précipiter avec des trucs qui semblent efficaces, infirmés par les études suivantes et montrant même parfois un sur-risque au final...)


4/ Gynécologie

L'USPSTF recommande un dépistage de l'HTA chez les femmes enceintes lors des consultations de suivi mensuelles ainsi qu'un traitement préventif par aspirine 81mg dès  12SA si facteurs de risque de prééclampsie.

Alors que l'USPSTF va proposer de réabaisser le début du dépistage de cancer du sein à 40 ans, un article du NEJM présente une fois de plus les bénéfices plus que modestes de ce dépistage par rapport aux risques :


5/ Rhumatologie

La HAS a publié des recommandations concernant les pathologies de l'épaule. Les arbres diagnostiques et de prise en charge sont facilement utilisables.

Devant une épaule douloureuse aigue (< 6 semaines), il est recommandé d'évoquer une tendinobursite dégénérative (gestes répétés), une résorption de calcification (brutal et hyperalgique), une arthropathie en poussée (microcristaline ou arthrose) ou un Parsonage-Turner (douleur brutale et intense suivi d'un défaut d'élévation du bras et scapula alata). Puis éliminer les diagnostics différentiels :SCA, EP, pneumothorax, tumeur de l'apex, PPR et arthrite septique. L'examen clinique est possible avec plein de tests dont le niveau d'utilité est "accord d'expert" (on se rappellera juste que l'arc douloureux est le meilleur, cf ici).

Pour les épaule douloureuses chroniques ( >6 semaines) ,  il faut différencier: 

  • l'épaule non enraidie : sans limitation à la mobilisation active (tendinite, bursite, arthropathie acromio-calviculaire), ou avec limitation à la mobilisation active (rupture tendineuse ou limitation liée à la douleur)
  • l'épaule enraidie: capsulite rétractile primaire ou secondaire (interligne normal à la radio), ou arthropathie gléno-humérale (pincement articulaire=arthrose)
  • l'épaule instable: souvent post-traumatismes répétés, à adresser au chirurgien ou spécialiste de l'épaule
  • l'épaule neurologique: syndromes canalaires, à adresser au spécialiste adapté

 La prise en charge repose :

  • initialement : le maintien des activités, les antalgiques de pallier 1 et 2 (accord d'expert) et les AINS (grade B, donc plus éprouvés).
  • En cas de persistance à 6 semaines:  la radiographie est l'examen recommandé : épaule face 3 rotations + faux profil de Lamy. Le traitement est identique, adapté aux radios pour la kinésithérapie (grade B), et éventuellement des infiltrations de corticoïdes (grade B, possible si AAP ou INR < 3 ou interruption 24h avant de l'AOD et reprise à H+6) L'acide hyaluronique et les PRP n'ont pas montré d'efficacité. 
  • En cas de persistance malgré tout: refaire un bilan de kinésithérapie, réévaluer le contexte professionnel et la perte d'autonomie, faire une échographie par un échographe expérimenté ou une IRM, adresser au MPR, rhumato ou chirurgien selon la prise en charge, sachant que "la prise en charge chirurgicale est inutile dans la tendinopathie non rompue".

6/ Ophtalmologie

Dans une revue systématique portant sur la DMLA, la Cochrane met en évidence un bénéfice d'une supplémentation par oligo-éléments AREDS (vitamine C, E, béta‐carotène, et zinc) pour ralentir la progression de la maladie. Cependant, la HAS et le NICE ne les recommandaient franchement pas compte tenu du bénéfice peu clair et des risques d'effets indésirables urinaires et pulmonaires (cf ici)


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lundi 18 septembre 2023

Dragi Webdo n°410 : allergie pénicilline, nirsevimab, kyste pilonidal, BPCO (exacerbations/corticoïdes, trithérapie inhalée)


 Bonjour ! Voici les actualités de la semaine !

 

1/ Pharmacovigilance

Il n'était déjà plus possible d'initier du topiramate en médecine générale (cf ici). L'ANSM renforce la protection des patientes avec une mesure justifiée par laquelle il aurait peut être fallu commencer : il n'est plus possible de prescrire le topiramate aux femmes enceintes ni aux femmes n'ayant pas de contraception efficace.

Un nouvel article sur l'allergie à la pénicilline a été publié et concerne une nouvelle fois l'utilisation du PEN-FAST (cf ici). C'est un essai randomisé dans lequel les patients avec une "notion d'allergie à la pénicilline" passaient le questionnaire PEN-FAST et étaient éligibles s'il était strictement inférieur à 3. Les patients étaient randomisés soit dans "réintroduction classique" (groupe contrôle: schéma progressif avec test cutané à l'amoxicilline puis ré-administration orale chez un allergologue) soit dans "réintroduction orale à 250mg d'amox" (groupe intervention). 180 patients ont été inclus dans chaque groupes et il y a eu 1 cas de réaction allergique dans chaque groupe soir 0,5%. Ainsi la réintroduction orale directe chez les patients avec PEN-FAST < 3 a démontré sa non infériorité par rapport à la réintroduction chez un allergologue. En pratique, le protocole prévoyait l'administration au cabinet de 250mg d'amox puis une surveillance de 1h dans le cabinet médical avec l'administration orale d'antihistaminiques en cas de réaction allergique. Selon les auteurs, ce protocole faciliterait la réintroduction en cabinet car ne nécessitant pas de RDV d'allergologue chez les patients à faible risque.


2/ Infectiologie

Toujours dans l'attente de l'étude Harmonie concernant le nirsevimab, voici une correspondance publiée dans le NEJM venant compléter l'étude Melody dont nous avions parlé ici. En effet, le recrutement avait été limité à 1500 patients avec le Covid, mais l'étude prévoyait d'inclure 3000 patients pour évaluer la sécurité du traitement. Dans cette prolongation d'étude, les auteurs trouvent qu'il y a une réduction significative des hospitalisations pour infections respiratoires basses à VRS : efficacité de 76% (ce qui était le critère de jugement secondaire, non significatif initialement). On pourrait donc conclure sur cette publication à une efficacité du nirsevimab sur les hospitalisations, mais les auteurs précisent bien que ces tests sont exploratoires et qu'il n'y a pas eu de prise en compte de la multiplicité des tests. Alors que les premières doses peuvent être commandées et administrées, et que les recommandations se multiplient au sujet de cette immunothérapie coûteuse, il n'y a toujours pas de preuve probante disponible au sujet de l'efficacité de ce traitement sur la prévention des hospitalisations. Rappelons que l'étude Harmonie, sensée démonter l'efficacité du nirsevimab sur les hospitalisations, n'est toujours pas publiée : il n'est donc pas possible à ce jour d'évaluer sa qualité.  

En attendant, la HAS a quand même fait une fiche de recommandations rapides concernant le nirsevimab. Elle rappelle que ce traitement peut être fait pour tous les enfants nés après le 6 février 2023, en 1 injection, à espacer de 2.5cm d'une injection d'un vaccin si injecté le même jour.

Le BMJ aborde la prise en charge du kyste pilonidal en médecine générale. L'incidence est estimée à  26 pour 100 000.  Les manifestations peuvent être un abcès, une fistule, un granulome chronique. Une lésion non inflammatoire asymptomatique peut ne pas être traitée et ne nécessite pas de surveillance particulière jusqu'à ce qu'elle devienne symptomatique. Le traitement des formes symptomatiques aiguës est chirurgical (et les antibiotiques n'ont pas d'efficacité clairement démontrée hormis en post-opératoire éventuellement), mais une prise en charge non chirurgicale peut être discutée par le chirurgien dans les formes chroniques.

 

3/ Pneumologie

Abordons maintenant Becomeg, un essai controlé randomisé en médecine générale évaluant l'intérêt des corticoïdes dans l'exacerbation de BPCO. Bien que les auteurs n'aient pas atteint le nombre de sujets nécessaires, il s'agit de la plus grosse étude en ambulatoire sur la question. Ainsi,  175 patients avec suspicion d'EABPCO non sévère ont été randomisés. À 8 semaines de l'exacerbation, il y avait  42% d'échec du traitement dans le groupe corticoïdes oraux et  35% dans le groupe placebo. Cette différence n'était pas significative, mais peut être que si la puissance de l'étude avait été meilleure, il y aurait pu avoir un sur-risque d'échec chez les patients sous corticoïdes. D'après les recommandations GOLD, 40mg/j pendant  5 jours de corticoïdes réduirait la durée des symptômes de quelques jours uniquement sur des exacerbations durant 4 à 6 semaines, mais cette étude est plutôt en défaveur de leur utilisation.

La place de la double bronchodilatation versus trithérapie dans la BPCO est régulièrement discutée. Cette nouvelle analyse concerne les patients en stade E (ayant > 1 exacerbation dans l'année) qui sont éligibles soit à une double bronchodilatation soit a la trithérapie, notamment si la bithérapie est insuffisante et éosinophilie >  300 d'après les essais randomisés Ethos et Impact. Une étude de cohorte en vie réelle semble donner des résultats allant dans le même sens. La trithérapie ne réduirait les exacerbations qu'en cas d'hyperéosinophie et ne serait associée à un sur-risque de pneumopathie que chez ceux ayant des éosinophiles bas. Cela confirmerait donc l'absence d'intérêt des CSI dans la BPCO en l'absence d'éosinophiles > 300.

 


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lundi 11 septembre 2023

Dragi Webdo n°409 : motivations en MG, antipsychotiques, troubles de personnalité, AINS et MTEV, vaccin Covid, vaccin pneumocoque, température, iSGLT2/prévention primaire

Bonjour, les choix post-ECN se poursuivent encore pour quelques jours, et dans ce contexte, on peut parler des motivations des MG à travailler. Cet article du BJGP classe les MG en 5 catégories de motivations: "appartenir à une classe et pas tant l'argent" (53%), "à peu près tout"(26%),  "aider les autres" (9%), "le travail" (8%) et "l'argent et le patient" (4%). Et vous, quelles sont vos motivations ? Aller, voici les actualités de la semaine, bonne lecture !


1/  Pharmacovigilance

Un article de cohorte rétrospective publié dans Annals of internal medicine a comparé la sécurité de différents antipsychotiques. Elle concerne les patients de plus de 65 ans sans troubles psychiatriques pour lesquels un antipsychotique a été prescrit dans les suites d'une chirurgie majeure notamment pour "délire post opératoire". Il n'y avait pas de différence de mortalité hospitalière, d'arythmie cardiaque, de pneumonie ou d'AVC/AIT entre la quétiapine, haldopéridol, olanzapine et risperidone.

Une étude de cohorte publiée dans le BMJ a étudié le risque de maladie thrombo-embolique veineuse de différents AINS et des contraceptions hormonales. Deux millions de femmes ont été suivies pendant 10 ans environ et les risques thromboemboliques veineux ont été étudiés chez celles prenant uniquement des AINS, celles prenant uniquement un contraceptif hormonal, celles prenant les deux et celles en prenant aucun. Sans traitement, l'incidence de MTEV était de 2,5/10000 par an, avec un AINS de 25/10000 par an (16-18/10000 pour naproxène et ibuprofène mais 42/10000 pour diclofénac!!), avec les contraceptions combinées de 3è/4è génération de 11/10000, avec une contraception combinée de 2è génération de 7/10000, avec les progestatifs seuls de 3/10000. Enfin, l'association AINS+contraception hormonale était associé à un risque de MTEV de 142/10000 avec les 3è/4è génération, de 64/10000 avec les 2è génération et 17/10000 pour les progestatifs. Ainsi, la prise d'AINS multiplie par 7-11 le risque de MTEV chez les patientes prenant une contraception hormonale à risque thromboembolique, avec un risque supérieur lié au diclofénac par rapport au naproxène et à l'ibuprofène (une raison de plus de les privilégier)


 

2/ Psychiatrie

Le BMJ aborde les troubles de personnalité. Leur prévalence atteindrait 10% de la population générale, 50% de la population suivie en psychiatrie et 70% des patients hospitalisés en psychiatrie (avec 10-20% de personnalité borderline). Les principaux indicateurs pouvant faire suspecter un trouble de personnalité sont : 

  • des troubles de l'affectivité (changements d'humeur rapides, humeur maussade, anxiété, colère, détachement...)
  • un dérèglement des impulsions (comportements à risque, promiscuité sexuelle, abus d'alcool et de drogues)
  • des problèmes interpersonnels dans sa vie : relations turbulentes et instables (borderline), dépendance, isolement, et dans la relation de soins (utilisation accrue des ressources, sentiment d'impasse, prescriptions inhabituelles, consultations à rallonge)
  • une mauvaise réponse aux traitements éprouvés d'autres troubles mentaux (anxiété, dépression, syndrome de stress post-traumatique...)
  • il peut s'y ajouter des indicateurs mineurs: bizarreries, des symptômes dissociatifs, des actes auto-agressifs, des symptômes médicalement inexpliqués, des troubles émotionnels et du comportement dans l'enfance, des antécédents de traumatisme, une déficience dans l'environnement familiale.

La prise en charge en soins primaires repose sur une approche centrée patient, utilisant l'empathie et une attitude de non-jugement. Il est nécessaire de reconnaitre ses limites sur cette prise en charge, de reconnaître les symptômes du patient, de valider ses expériences et de faire attentions à nos propres émotions. Le plan de soins doit être clair, utiliser les médicaments si nécessaire mais éviter la polymédication inutile ou les changements fréquents. Les RHD classiques et les thérapies comportementales peuvent être proposées et il peut être également utile de faire réfléchir le patient à la 3ème personne: "que diriez-vous à un ami dans cette situation?". Ainsi, il est préférable d'anticiper des consultations régulières, plus longues que des consultations classiques et avoir une procédure pour répondre aux demandes urgentes et crises aiguës du patient. Un avis spécialisé est nécessaire pour préciser le diagnostic, adapter les traitements ou en cas de difficulté de gestion du patient.

 

3/ Infectiologie

La HAS a modifié sa reco concernant la vaccination pneumocoque chez l'adulte. C'est la fin du schéma Prevenar 13 puis Pneumovax (23valences). En effet, le vaccin à 20 valences, Apexxnar®, a démontré sa non infériorité par rapport au 13 valences et au 23 valence. Le schéma 13 puis 20 valences serait même supérieur aux schéma 13 puis 23. Cependant, compte tenu du faible bénéfice des doses répétées et pour simplifier, il est maintenant recommandé de ne vacciner contre le pneumocoque qu'avec le vaccin 20 valences, les vaccins 13 et 23 n'ayant selon la HAS plus leur place chez l'adulte. MAIS : ce vaccin n'est pas disponible en France !

Un article de Nature concerne les nouveaux vaccins à ARNm bivalents et les compare aux vaccins monovalents à ARNm originaux. La réponse face aux variants omicron BA4/BA5 était supérieure avec les vaccins bivalents et sans différence d'efficacité entre les 2 types de vaccins concernant la souche originale. Concernant les données de sécurité, les évènements étaient similaires entre les 2 types de vaccins sans que les vaccins bivalents ne fassent apparaître de sur-risque ou de nouveaux effets indésirables.

Bien que la fièvre soit définie comme une température > 38°C, la température "normale" des personnes varie. Elle est supérieure chez les hommes par rapport aux femmes d'environ 0,1°C, varie au cours de la journée +0,2°C entre 8h et 16h et diminue de 0,15°C entre 25 ans et 80 ans. Bon, au final, ça ne varie pas tant que ça !


4/ Diabétologie

En prévention primaire, l'inhibiteur de SGLT2 le plus éprouvé est la dapagliflozine avec un bénéfice sur "mortalité+ insuffisance cardiaque" mais pas sur les évènements cardiovasculaires (DECLARE-TIMI comportant 60% de patients en prévention primaire, cf ici.). Voici une revue systématique des molécules de cette classe en prévention primaire. Les iSGLT2 semblent avoir un bénéfice sur les évènements cardiovasculaires (AVC et IDM) uniquement chez les patients diabétiques ayant une maladie rénale chronique (OR = 0,74). Ils ne montrent pas de bénéfice sur les évènements cardiovasculaires en prévention primaire chez les patients diabétique avec facteurs de risque CV multiples. Cependant, ils montraient une réduction de mortalité globale, essentiellement portée par DAPA-CKD (dapagliflozine chez patients avec maladie rénale chronique).


C'est terminé pour cette semaine ! Vous pouvez toujours vous abonner sur FacebookTwitter et à la newsletter (mail) pour ne rater aucun billet. Pour cela, inscrivez votre adresse mail tout en haut à droite sur la page (sans oublier de confirmer l'inscription dans le mail provenant de "hi@follow.it" et intitulé "Veuillez confirmer votre abonnement à Médicalement Geek", qui vous sera envoyé et qui peut arriver dans vos spams)

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@Dr_Agibus

dimanche 3 septembre 2023

Dragi Webdo n°408 : gliflozines (recos), ostéoporose (recos Canada), dépistages/mortalité, AVK vs AOD, FA infraclinique, insuffisance veineuse, acné, psilocybine, Cerebria card game

Bonjour ! Le congrès de l'ESC est maintenant fini, mais le billet va donc être encore marqué par de nombreuses actualités cardiovasculaires. Bonne lecture et bonne rentrée des classes !

 

1/ Pharmacovigilance

Une revue de synthèse a été publiée par les sociétés françaises de cardiologie, de diabétologie, de néphrologie et de médecine générale  concernant l'efficacité des inhibiteurs de SGLT-2 dans les indications relatives à ces 3 domaines médicaux. L'article rappelle les indications pour lesquelles ils ont démontré une efficacité et qui peut les prescrire dans ces indications (cf tableau suivant). Par ailleurs, les auteurs rappellent le risque d'infection génitale et urinaire, et suggèrent que ce ne sont pas des contre-indications aux gliflozines. Cependant, leur balance bénéfice/risque est à réévaluer à partir de 4 cystites/an. Il y a des risques d'hypotension orthostatique, le DFG va initialement s'altérer, dans  90% des cas la baisse est de moins de 30%. Chez les patients diabétiques, il est recommandé d'interrompre le traitement en cas de vomissement, déshydratation, jeûne, AEG, régime cétogène.... pour limiter le risque d'acidocétose. Il est également recommandé de les interrompre 3 jours avant une chirurgie programmée sous AG et jusqu'à reprise de l'alimentation. Enfin, devant le risque d'amputation possible, les gliflozines sont à éviter si antécédent d'amputation ou AOMI sévère.

On avait abordé le sur-risque de cancer cutanés non mélanome avec l'hydrochlorothiazide mais non retrouvé avec l'indapamide. Cette étude présentée au congrès de l'ESC (si quelqu'un à la ref biblio...) met en évidence que le risque global de cancer est plus faible avec l'hydrochlorothiazide qu'avec les autres diurétiques mais confirme le sur-risque de cancer cutané, qui ne remet pas en cause la balance bénéfice risque (mais qui suggère de l'éviter en cas d'antécédent de cancer cutané)

Ce n'est pas de la pharmacologie, mais un article de cohorte incluant 26 000 femmes suivies pendant 20 ans environ, montre que les patientes ne consommant pas de chair animale (végétariennes) avaient un sur-risque de fracture du col du fémur par rapport aux consommatrices régulières. Ce sur-risque n'étaient pas retrouvé chez les patientes consommant de la chair animale moins de 5 fois par semaine, ni chez les patientes pesco-végétariennes (avec consommation de poisson).


2/ Cardiovasculaire

Un article va relancer le débat sur le choix AVK vs AOD. Cet essai randomisé de Circulation a comparé le maintien des AVK (dérivés de coumadine) avec un switch pour un AOD chez des patients fragiles de plus de 75 ans traités par AVK pour fibrillation auriculaire. Les auteurs montrent qu'il y a un sur-risque d'hémorragie avec le switch vers AOD: NNH de 17 pour les hémorragies majeures et saignement significatifs non majeurs. Ce résultat était en fait lié au sur-risque de saignements significatifs non majeures, c'est à dire ayant nécessité une consultation. Il n'y avait pas de différence concernant les hémorragies majeures seules, ni la mortalité, ni le risque embolique. L'analyse des sous groupes d'AOD prescrits retrouve que ce sur-risque est présent aussi bien pour le rivaroxaban que pour l'apixaban. Pour mémoire, l'apixaban est le seul AOD ayant démontré une supériorité par rapport aux AVK (moins d'hémorragies) et le rivaroxaban est un des plus pourvoyeur de saignements. Ainsi, il est probable qu'instaurer un traitement par apixaban soit bénéfique, mais il semble préférable de ne pas switcher un AVK pour un AOD chez un sujet âgé fragile si l'INR est stable et l'AVK bien toléré.

Un essai randomisé a proposé d'anti-coaguler ou de traiter par placebo des patients avec des "épisodes auriculaires à fréquence élevée" qui sont des épisodes courts de FA détectés par les dispositifs implantables. Cet essai mené chez des patients de plus de 65 ans (pour qu'il y ait une indication d'anticoagulation d'après le CHA2DS2-VASc) ne retrouve pas de réduction d'évènements cardiovasculaires chez les patients anticoagulés, mais ils avaient un surrisque hémorragique (NNH=72). Bref, cet essai va permettre d'avancer sur l'ensemble des épisodes de FA courts dépistés par les appareils portables, smartwatch et autres dispositifs. En gros, le bénéfice d'anticoagulation (quand le CHA2DS2-VASc le requiert) ne semble exister que sur des FA retrouvées à l'ECG, le reste étant du surdiagnostic et du surtraitement.

Un essai contrôlé randomisé a étudié l'efficacité du semaglutide chez les patients insuffisants cardiaque à FEVG préservée avec un IMC>30kg/m2. Les patients traités avaient en effet, moins de symptômes d'insuffisance cardiaque que ceux du groupe placebo sur un questionnaire spécifique et amélioraient leur test de marche de 6min de 20m. Cependant, le semaglutide et les analogues du GLP-1 n'ayant pas d'effet physiologique sur l'insuffisance cardiaque, le plus probable est que l'amélioration des symptômes soit non spécifique et liée à la perte de poids : -13% dans le groupe semaglutide vs - 3% dans le groupe contrôle.


3/ Dépistage

On avait parlé de l'inefficacité des dépistages en termes de mortalité globale il y a quelques années (seul le dépistage de l'anévrisme de l'aorte abdominale pouvait peut être montrer un bénéfice sur ce critère). Cette nouvelle étude du JAMA internal medicine, montre qu'il n'y a toujours pas de gain de mortalité sur les dépistages du cancer du sein, de la prostate, du CCR par test fécal et par TDM pour le cancer du poumon (compte tenu de l'intervalle de confiance très large). Cependant, le dépistage du CCR par sigmoïdoscopie (tous les 5 ans, on en avait parlé ici), pourrait améliorer la durée de vie des patients.

Un article canadien aborde leurs nouvelles recommandations de dépistage de l'ostéoporose. Pour recontextualiser : aux Etats -Unis, le dépistage par DMO est recommandé systématiquement à 65 ans et en France, il n'y a pas de dépistage systématique mais seulement si facteurs de risque. Cette recommandation canadienne s'appuie sur un article danois et propose un dépistage systématique à 65 ans par calcul du FRAX sans utilisation de la DMO. La DMO n'est indiquée qu'en seconde intention en cas de FRAX supérieur à 15%. Ils recommandent ce dépistage systématique chez toutes les femmes à 65 ans. Le dépistage avant 65 ans ou chez l'homme n'est pas recommandé. Cette approche permet de passer en revue les principaux facteurs de risque d'ostéoporose à 65 ans et de faire la DMO aux patients les plus à risque. C'est proche des recos HAS, mais mieux cadré.

 

4/ Dermatologie

Une revue systématique d'Annals of Family medicine revient sur les traitements de l'acné dans une revue systématique. Les auteurs trouvent que les traitements les plus efficaces sont (du plus au moins efficace) : l'isotrétinoine orale, puis une trithérapie locale combinant antibiotiques + rétinoïdes + peroxyde de benzoyle,  puis une trithérapie comportant antibiotiques oraux + rétinoïdes locaux +  peroxyde de benzoyl (mais la différence est faible avec la trithérapie locale). Les monothérapies avaient des effets similaires, en notant cependant que les antibiotiques oraux et locaux et les rétinoïdes  locaux sont plus efficaces sur les lésions inflammatoires que sur les lésions non inflammatoires. Au niveau des arrêts de traitement pour mauvaise tolérance, les rétinoïdes topiques semble être les moins bien tolérés, et les antibiotiques locaux les mieux tolérés mais la probabilité d'arrêt est similaire entre tous les traitements (et les antibiotiques locaux ne sont pas recommandés en monothérapie).

Le BMJ aborde la prise en charge de l’eczéma variqueux des membres inférieurs. L'examen clinique va retrouver des varicosités, des oedèmes, une hyperpigmentation cutanée et une sclérose cutanée. Les examens complémentaires, dont le Doppler, ne sont pas nécessaire sauf en cas de suspicion de une thrombose veineuse associée. Et une fois qu'on a éliminé une cellulite, un psoriasis, une dermatite de contact, une dermatophytose et un coup de soleil (brûlure 1er degré),  la prise en charge est symptomatique. Cela consiste en l'application d’émollients, parfois associés à des dermocorticoïdes si le prurit est intense. Les auteurs proposent également une sur-élévation des jambes, l'activité physique, la perte pondérale et une contention de grade II à III (notamment en cas d'ulcères veineux). Un avis dermatologique ou phlébologique/vasculaire peut être pris en cas de cellulite récidivante, ulcère persistant, AOMI associée ou doute diagnostic. 

5/ Psychiatrie

Dans la dépression, un article du JAMA a comparé une dose unique de psilocybine 25mg (on en avait parlé ici) versus placebo (ils ont utilisé de la niacine car produit des effets indésirables similaires sans effet antidépresseur connu). Ces 2 traitements étaient accompagnés de psychothérapie. Les patients devaient avoir un score MADRS > 28 et ne pas s'être amélioré de 30% dans les jours précédents pour s'assurer que les patients aient une dépression modérée à sévère au début du traitement. Ainsi, les patients inclus avaient un MADRS moyen à 35 (+/- 5) soit environ la moitié des patients avec dépression sévère et l'autre moitié avec dépression modérée. Dès J8, le traitement améliorait significativement la dépression (MADRS: -17,8 vs -5,8) et cela se maintenait à J48 (MADRS: - 19,1 vs -6,8). Cette différence est considérée comme significativement pertinente et presque "substantielle". Il n'y a pas eu davantage d'effets indésirables avec la psilocybine qu'avec la niacine ni d'effets indésirables graves. Il n'y avait pas d'augmentation des idées suicidaires avec le traitement, comme ça peut être le cas avec les IRS. Il est dommage de ne pas avoir présenté une analyse en sous groupe des dépressions modérées (MADRS < 34) et sévères (MADRS >35). Les champignons sont peut être un des futurs traitements les plus efficaces de la dépression, à suivre !

 

6/ Le jeu du mois: Cerebria the card game

"Cerebria the card game" est le petit frère du gros jeu "Cerebria" dont nous avions parlé ici. On y retrouve le thème global: mettre en jeu des émotions positives et négatives. Le principe du jeu et de sélectionner des émotions proposées aux joueurs et de les jouer devant soi pour réaliser des combinaisons de "vibrations" correspondant à une couleur (3 ou 4 cartes de "vibration" identique, ou 4 cartes de "vibration" différentes par exemple). Ces combinaisons rapporteront des fragments lumineux ou obscurs en fin de manche et le premier à atteindre un objectif de fin de partie remporte le jeu. Pour ajouter de la stratégie à ce jeu de carte, chaque émotion mise en jeu vient avec des fragments, qui peuvent être économisés pour être récoltés en fin de manche ou utilisés pour déclencher un des pouvoir spécifique à chaque carte et ainsi prendre l'avantage en piochant, échangeant ou pénalisant l'adversaire. Les parties sont rapides (beaucoup plus que le "gros" jeu du même nom), le jeu visuellement plaisant et stratégiquement accessible. C'est donc un bon jeu dans ce format !



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